Rarement j’aurais eu aussi froid ! Mais je ne suis pas homme à bouder mon plaisir. Et du plaisir, il y en a à prendre, et plus qu’à l’ordinaire. Ça n’arrive qu’une seule fois par an, comme il est dit dans la chanson. Et, ma foi, c’est tant mieux, parce que je ne ferais pas ça tous les jours. C’est épuisant.
Epuisant, mais tellement sympa et dépaysant. La visite de Dublin en soi sort déjà de l’ordinaire, mais assister à la parade, c’est franchement un moment de vie. Autre chose. Entre le safari dans la savane et le trekking au pôle.
La première des choses est de se lever aux aurores. Ce n’est pas que le défilé commence si tôt que ça, non, c’est tout simplement que vous ne serez pas tout seul et qu’il va falloir trouver LA place. Celle qui permettra de tout voir, de ne rien manquer de cette folie collective de deux heures et demi, sans compter tout se qui se passe avant. Avant. Parce qu’après, cela tient de la volée de moineaux. Ces centaines de spectateurs, d’acteurs, de badauds de ce gigantesque happening celtico-païen s’égayent d’un seul coup en moins d’une demi-heure dans toutes les directions. Il faut avouer qu’après plus de deux heures sans quasiment bouger par une température voisine de zéro centigrade, sous des petites averses de neige, courtes mais bien glaçantes, ceux qui ont envie de s’attarder font figure d’originaux, pour ne pas dire d’excentriques.

Avant la parade, le spectacle est sur les trottoirs. Vous allez y trouver un nombre étonnant de fées, de leprechaums, de trolls et de magiciens divers et variés, tous mus par une communion festive et celtique propre aux amoureux de la verte Erin. Dans certaines rues, vous pourrez même dénicher des saucisses géantes faisant du gringue aux jeunes filles, des mères de familles surveillant jalousement une progéniture peinturlurée en vert et orange, de grands gaillards en kilt en train de se faire maquiller, des instruments de musiques tout droit sortis de l’imagination débridée d’un savant fou, des énergumènes montés sur échasses qui en grillent une dernière avant de rentrer chez eux, et tellement d’autres choses étonnantes qu’après, vous ne vous étonnerez plus de grand chose. Sauf… peut-être d’un spectacle de rue retraçant les aventures du roi Arthur ou d’un chevalier méconnu, entouré d’un médecin véreux et d’un député travailliste.
Dublin est folle. Ou fou, au choix, je ne sais pas.
Et sincèrement, cela n’a pas beaucoup d’importance. L’important, c’est de s’y sentir bien, comme chez soi, au milieu de ces touristes en blindé amphibie qui visitent la capitale, de tous ces mini-spectacles qui abondent un peu partout. C’est la raison pour laquelle le défilé de la Saint Patrick devrait faire partie de la vie ordinaire de tout un chacun. Je ne vais même pas tenter de vous le décrire. Ce serait un peu comme de vous donner le nom de l’assassin avant la fin du film. Sachez seulement que vous y trouverez quantité de choses tout à fait improbables, comme des champignons qui dansent, de grands personnages aux voiles à la dérive, de vraies majorettes venues expressément de Dallas, une collection de déguisements qui inspireraient Jean-Paul Goude, des chars étonnants, des lapins roses et des guêpes aux yeux faits, un saint Nicolas en goguette qui avait perdu son étole, des grosses têtes que Bouvard lui-même aurait pu engager, une énorme machine à bulles sur roulettes, de grands oiseaux roses et aussi le club des coccinelles du coin (il s’agit bien sûr de Volkswagen…). J’en passe, et de bien meilleures. Une mention spéciale tout de même pour ce chien immense et extraordinaire, au poil long et à l’œil un peu distant, vêtu d’un manteau rouge flamboyant, et qui emmène avec son maître en kilt bleu la brigade des pompiers de Dublin.
Aux fenêtres, les drapeaux fleurissent, pas toujours irlandais, les spectateurs s’organisent, au chaud, et en bas, les retardataires traversent en dehors des barrières, sous l’œil inquiet des policemen et des secouristes. Lorsque vous verrez apparaître les premiers uniformes, montés sur de chevaux pommelés, c’est que la parade arrive. D’abord les officiels, après… les fêtards. Et il y en a, croyez-moi ! Alors, emmitouflez-vous, prévoyez un bon parapluie, des bottes et un ciré, et vive l’aventure ! Et lorsque le défilé sera passé, ne croyez surtout pas que c’est terminé. Le week-end ne fait que commencer… Si vous êtes normalement constitués, vous devriez suivre.

Sivous voulez tout savoir sur la St Patrick à Dublin cette année, cliquez sur : http://www.stpatricksfestival.ie/

Quelques adresses
Texte & Photos JF Macaigne
Dublin, ça se visite !
 
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