La MARNE
De Paris à Meaux

 Jean-François Macaigne

Sortie de Paris - La Marne des canotiers - Lagny - Meaux 1 - Meaux 2 - Musée de la Grande Guerre
 
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PEINTRES ET CANOTIERS

L’aventure, elle, commence sur la carte. Pour éviter un gros détour et quelques barrages, après l’écluse de Saint-Maur, on emprunte le tunnel qui passe sous la ville pendant presque 600m. La construction de ce petit canal démarra sous Napoléon Ier et s’acheva sous Charles X. Il file retrouver la Marne de l’autre côté de sa boucle de 14 km, et sincèrement, c’est aussi bien, autant pour nous que pour tous les amoureux du canotage, de l’aviron et de la promenade dominicale, les yeux dans le flou et la main dans la main.
Nous débouchons sur l’île Fanac. Nous y sommes, ou presque. Encore quelques dizaines de mètres. Sur la droite, le souvenir s’estompe.
Il y a une centaine d’années – le temps passe vite – la mode était aux canotiers. Un chapeau de paille tout simple, tout rond, comme les gondoliers de Venise en portent encore, mais sans le ruban. Aux beaux jours, on canotait sur des barques en bois, le long des îles de la Marne. Les hommes portaient ce couvre-chef aux chaleurs estivales, avec un maillot de corps avantageux et des biceps qu’ils exhibaient pour séduire les filles. Pourquoi un canotier ? Parce qu’il rappelait le couvre-chef des marins et des mariniers de l’époque. On emmenait sa belle et on déjeunait ou l’on dînait dans une guinguette, ce qui permettait de danser le moment venu et de parfaire la journée.
Des guinguettes, il n’y en a plus autant. L’une des plus célèbres, « Chez Gégène », est toujours à Joinville –le-Pont, pas très loin des locaux de l’Aviron de Joinville. A l’origine, l’établissement était une péniche tirée sur la berge dont la réputation était un peu scabreuse. Vint ensuite en 1918, à la suite d’un incendie qui ravagea « La Péniche », Eugène Favreux, dit Gégène, qui relança l’endroit avec un dromadaire et des jeux de quilles. La proximité des Studios de Joinville et les années folles firent le reste.
Les images imprimées dans notre mémoire sont celles des peintres du début du siècle, bien évidemment : Cézanne, Corot, Pissaro, Renoir, le Douanier Rousseau, Gueldry, et tant d’anonymes… Mais tous n’ont pas peint que la Marne. La Seine et l’Oise furent aussi croquées, pour notre bonheur. Il reste de ces jours heureux des maisons, une ambiance paisible, et des promenades le long des berges. Le port de Nogent, sous le pont, offre au plaisancier une halte agréable, et un restaurant en plein air.
Le bateau remonte entre les belles maisons 1900 en bord de rivière. Voici l’île des Loups, qui ne fut longtemps que des champs de vignes d’où l’on tirait le guinguet, un blanc tirant sur la piquette, qui donna le nom aux guinguettes où on le servait, et inspira nombre de chansons, dont l’immortel « Ah le petit vin blanc » qui fit la renommée de Nogent. Puis l’île d’Amour, bien cachée derrière sa végétation. Pour y aller, pas de pont. Il faut donc un engin pour passer, et une nouvelle forme de mini-radeau fluvial semble s’épanouir, pas toujours esthétique, mais fonctionnel, et en tout cas certainement fabriqué artisanalement…
Viennent ensuite Le Perreux, Bry-sur-Marne, Neuilly-Plaisance et leurs beaux immeubles, et l’on arrive à l’écluse de Neuilly-sur-Marne. C’est là, sous les grappes jaunes d’un acacia en fleur, qu’il faut abandonner la rivière pour un temps, car sur celle-ci, la circulation s’interrompt à Gournay-sur-Marne. On la voit de temps en temps, en dessous de nous, puis les arbres nous la masquent. Par instants, on distingue le haut des immeubles de Chelles, puis tout disparaît, et la verdure reprend ses droits. Le canal est assez rectiligne, et pour tout dire, un peu monotone. On en sort par l’écluse de Vaires, et tout de suite après le grand pont sur lequel circule l’autoroute A 104, se présente Lagny.