Le
lendemain matin, va savoir pourquoi, je me suis levé aux aurores.
C’est le cas de le dire, le soleil n’est pas encore apparu.
J’enfile un pull et attrape l’appareil photo, juste à
temps pour prendre un arc en ciel magnifique au dessus de la forêt.
Le ciel est en passe de se dégager, car le vent souffle, et le
petit drapeau Locaboat claque gaiement sur son mât inox. Une dernière
séance de photos pour immortaliser le si bel endroit sur fond de
ciel bleu, et nous levons l’ancre dans un bruit de chaînes
que ne renierait pas un fantôme écossais.
Au
moment où nous partons, un cygne femelle et ses trois petits (grands
pour leur âge, les garnements) viennent quémander un petit
quelque chose, et nous leur donnons les miettes du petit déjeuner
– des grosses miettes quand même - . « Dieu vous
le rendra » nous dit-elle, en langage cygne, que, comme tous
les plaisanciers, nous parlons très bien.
Nous repartons tranquillement vers Mirow,
où le château rococo nous attend. Nous en profiterons pour
évacuer les eaux usées. Nous n’en sommes pas encore
là. La vigie est à son poste, jumelles en mains, prête
à nous signaler tout objet suspect, ainsi que les lieux intéressants,
et nous laissons derrière nous le Zotzensee. Nous continuons sur
le canal Müritz-Havel, qui relie tous les lacs que nous avons traversé
jusqu’ici. Sur le bord, la main invisible du vent soulève
les nénuphars comme les jupes d’une jeune fille. A l’approche
de Mirow, toute une série de chalets sur pilotis borde la rive.
Certains sont véritablement de petites maison avec tout le confort,
y compris la TV satellite. Des pêcheurs s’activent sur un
balcon, et nous réduisons l’allure pour ne pas les gêner.
Mirow
Mirow nous accueille avec des maisons
coquettes aux pelouses tondues à ras, cachées dans les arbres.
Nous trouvons une marina juste à côté du château,
et amarrons Banzkow.
Visitez
Mirow…
La matinée est quasiment terminée,
mais, pleins d’espoirs, nous nous mettons en quête d’un
supermarché. La bonne nouvelle, c’est qu’il y en a
un, la mauvaise, c’est qu’il est de l’autre côté
de la ville. Cela nous donne l’occasion de visiter, et de passer
devant un cimetière militaire russe. C’est vrai qu’il
n’y a pas si longtemps…
En traînant le caddie (un must, lorsqu’on pratique la pénichette),
nous parcourons une petite bourgade un peu endormie, aux maisons à
pans de bois et aux arrière-cours à découvrir…
Il est passé 14h lorsque nous réintégrons la péniche,
et nous crions famine… Après le repas, un coup d’œil
à la montre, au ciel, et à l’état du lac nous
fait réfléchir. Si nous partons maintenant, il faudra naviguer
dans le Müritz face au vent qui s’est levé, avec probablement
quelques vagues et nous atteindrons Röbel (notre prochaine étape)
à la nuit tombante. Le Müritz, ça n’est pas n’importe
quel lac ! C’est le plus grand d’Allemagne
(115 km2). A aborder avec précautions, donc. La décision
est vite prise : nous passerons ce qu’il nous reste de l’après-midi
ici, et démarrerons tôt demain matin.
La
paresse aidant, nous nous accommodons fort bien de la situation. Une petite
visite au château, à la grande chapelle attenante, et à
une petite île romantique à souhait : l’île aux
amours (je n’invente rien), pour le moment vierge de tout couple
en mal de flirt. Nous passons un long moment à lorgner sur les
trésors du shipchandler de la marina, et finalement, j’achète
un drapeau français, qui viendra, sous le Locaboat, informer le
monde de notre citoyenneté. Ce petit bout de tissu se révélera
d’une redoutable efficacité pour se faire des amis, aux écluses
et dans les haltes diverses et variées que nous ferons («
Ach ! Paris !! »).
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