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D'Agen à Montauban par le canal de la Garonne JF Macaigne


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Moissac
Entre Valence et Moissac, le canal s’écarte de la Garonne. On circule entre les champs de colza et les cultures de pruniers et de cerisiers. Dans une pâture, un jeune homme initie un jeune cheval à sa présence en lui offrant à manger, et nous effleurons un moment unique dans la vie de ces deux-là. On se sentirait voyeur à moins, mais les spectacles comme celui-ci sont rares, et nous nous sentons privilégiés d’y assister. Ils restent, nous passons, et les arbres nous font une haie d’honneur.
Là où s’achève le Tarn, un peu avant de rencontrer Garonne, se trouve Moissac. Nous sommes sur la route des farines et du vin vers Bordeaux d’abord, l’Angleterre ensuite.
On entre dans la ville par un canal en pierre coincé entre deux murs, et barré par un séduisant petit pont tournant* . Au port de Moissac, il est difficile de trouver une place, comme plus loin à Castelsarrasin. Mieux vaut téléphoner pour réserver (05.63.04.09.89 / 06.86.20.25.55). C’est un grand rendez-vous anglophone, et le nombre de plaisanciers arborant l’Union Jack est impressionnant.
Quand j’étais petit garçon et que j’accompagnais ma grand-mère au marché, je me souviens qu’elle prenait souvent du raisin de Moissac. Et pour cause !… Moissac est la capitale du chasselas, un raisin blanc qui est cultivé ici depuis le moyen-âge, aux grains dorés et ronds. Si vous voyez sur la peau de petites taches mates, qui ressemblent à des taches de rousseur sur le nez d’une jeune fille, ce sont des coups de soleil ! C’est un gage de maturité, comme la peau halée d’un marin.
L’autre trésor de Moissac est en pierre, et classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. Il existait avant le développement économique de la ville. C’est un cloitre roman du XIe siècle, appartenant à l’abbaye Saint-Pierre de Moissac, dans lequel s’épanouit un cèdre magnifique de 200 ans d’âge qui aurait beaucoup à raconter si l’on prenait la peine de l’écouter. Les chapiteaux étaient eux aussi des livres de pierre pour ceux qui ne savaient pas toujours lire la Bible dans le texte, ou pour ceux qui, l’ayant lue, avaient parfois tendance à l’oublier. La finesse des détails donne l’impression que le sculpteur a gravé son œuvre avec une aiguille. Pas un n’est semblable aux autres. Tout autour du cloître, on visite les différentes salles de l’abbaye : scriptorium, où se tenaient les travaux d’écriture, le chauffoir, la salle capitulaire, et les deux chapelles Sainte Marthe et Saint Ferréol. Les piliers d’angles représentent les apôtres, et notamment Saint Jacques, puisque nous sommes ici sur le chemin de Compostelle, le champ des étoiles. C’est d’ailleurs toujours une halte majeure pour les pèlerins et la ville met à leur disposition une liste de gites d’étape et quantité de services spécialement conçus pour eux.
Par un escalier et une petite volée de marches, on accède depuis le cloître à la tour de l’Abbatiale. De la hauteur du premier étage, on découvre l’église et ses piliers peints, ainsi que la reconstitution d’un orgue du Xe siècle derrière une vitre. Observez de plus près les murs qui vous entourent : on distingue les signes des bâtisseurs, gravés dans la pierre, qui permettaient de « numéroter » les moellons pendant la construction.
L’église abbatiale fut consacrée en 1063 par Urbain II, et récemment restaurée à l’identique du XVe siècle. Le tympan du Portail est une merveille romane représentant le Christ en apocalypse entouré des évangélistes symbolisés, des vingt-quatre anciens de l’Apocalypse, et des humains à l’heure du choix de chaque côté du Portail. S’il vous rappelle quelque chose, c’est peut-être parce qu’il servit de décor au Nom de la Rose, de Jean-Jacques Annaud, d’après Umberto Eco. A l’intérieur, une ambiance assez particulière, due à la restauration, et des statues du XVe en bois polychrome : entre autres une mise au tombeau, impressionnante, et une fuite en Egypte, charmante. Avant de sortir, passez chapelle du St Sacrement et cherchez le Chagall. Il est tout petit, mais tellement beau ! C’est un vitrail.
Lorsque les 24 cloches de l’Abbatiale sonnent, tendez l’oreille, notamment s’il s’agit d’une célébration particulière. Les cloches sont jouées à la main, sur un instrument qui ressemble de loin à un orgue, mais que l’on devine de toute autre facture. La carillonneuse, Anne de Vergnette, est une virtuose, et il est rare d’entendre aussi belle harmonie.
Le Palais abbatial était à l’origine une hostellerie, et Urbain II et sa suite y logèrent. Ce n’est qu’à partir du XIVe qu’il devint le logement de l’abbé, mais aussi infirmerie et accueil des visiteurs. On y trouve un escalier somptueux et un petit jardin médiéval où poussent simples et plantes potagères.
En ville, quelques très belles maisons à pans de bois dans le quartier entre le marché et l’abbaye, rue Caillavet, ainsi que rue Tortueuse, entre le port et les Halles.
Les collectionneurs se souviendront peut-être des affiches réalisées pour le chocolat Meunier par Firmin Bouisset. Les plus connues représentaient une petite fille avec des nattes écrivant le nom de la marque sur un mur. L’auteur de ces œuvres ancrées dans la mémoire est né ici, dans l’un des deux moulins de la ville : le moulin du Bidounet. L’autre, le Grand Moulin, a été transformé en hôtel restaurant de luxe. Les deux à quelques minutes à pied du port.


*06 62 99 49 08
     
Texte & photos : © JF Macaigne
 
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