Nous avions précédemment pris goût au canal de Nantes à Brest
dans sa version « Oust », entre Redon et Josselin
(voir notre reportage), il nous restait à parcourir le tronçon
Redon/Nantes, pour vérifier que le côté sud était
aussi joli que le côté nord. C’est chose faite, et
le choix entre les deux croisières s’affirme difficile.
Pourquoi pas les deux, mon général ?
Redon a des allures de sous-préfecture, ce qui lui donne un charme
profond, ainsi qu’un calme apaisant, le long de ses rues peuplées
de vieilles demeures. Grande Rue, ce sont plutôt des maisons à pans
de bois, qui évoquent l’époque glorieuse des marins
de la Royale ou des corsaires aux faces tannées par le soleil
et le vent. Plus loin, de l’autre côté de cette petite
passerelle de fonte blanche qui enjambe l’une des écluses
du canal, ce sont des maisons de négociants, quai Duguay-Trouin,
face à la Vilaine, face aux grands voiliers qui remontaient le
fleuve au XIXe siècle, chargés de sel et de vin.
Au centre de Redon, l’église Saint-Sauveur, qui faillit
devenir cathédrale, offre aux yeux la maîtrise des architectes
romans et gothiques, ainsi que l’imagination du projet tel qu’il
devait être. La grosse tour carrée qui surplombe les toits est en fait ce qui devait coiffer le chœur d’une église
bien plus grande dont la flèche sur la place était l’une
des deux tours de façade à venir. Le plan du chœur
reproduit celui de la cathédrale de Reims, et servit ensuite de
modèle à des constructions bien plus prestigieuses comme
les cathédrales d’Amiens, de Beauvais, d’Orléans
ou de Tours pour ne citer qu’elles. Juste à côté est
le cloître paisible du Collège Saint-Sauveur, qui accueillit
en son temps l’élève Hervé Bazin.
Le port a changé d’emplacement depuis l’âge
d’or. Il s’est installé maintenant dans un grand bassin
entre Vilaine et canal, et lorsque le vent souffle, ce sont des centaines
de haubans qui claquent sur les mâts des voiliers qui dorment ici. La base Locaboat est là également, sous les yeux vigilants
de Don et de Matthew, dont les accents britanniques rappellent avec bonheur
que la navigation est universelle. Don est intarissable sur les Norfolk
Broads, sa région d’origine en Grande-Bretagne, où Nelson
lui-même apprit à naviguer lorsqu’il était
jeune garçon.
Au bout du quai s’ouvre la Vilaine. Il est temps de larguer les
amarres. Trois saules, trois jeunes filles. Nous y sommes.
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