De Lattes à Aigues-Mortes - De Aigues-Mortes à Palavas - De Palavas à Sète - Sète - Etang de Thau - Des Onglous à Béziers - De Béziers à Argens

C’est le grand beau. Le vent chasse les nuages, et tout l’équipage débarque. Objectif courses ! Nous sortons le caddy pliant – un must pour tout plaisancier – et partons à la recherche du supermarché.
Quelques kilomètres plus loin, nous avons déjà traversé la moitié de la ville en suivant le Canal de Sète, haut lieu de la plaisance et des joutes nautiques, lorsque nous trouvons enfin le Monoprix salvateur. Je pense au retour…
Finalement, celui-ci n’a pas été si pénible que ça. C’est déjà la fin de l’après-midi, et les petites maisons peintes qui nous entourent nous font de l’œil. L’appel est trop tentant et nous flânons entre les volets peints et les draps qui sèchent au vent. Tout ceci ressemble furieusement à la Grèce, et on ressent l’unité de ce peuple de la Méditerranée toute proche. Mêmes maisons, mêmes yeux rieurs, même âpreté dans la vie quotidienne. La civilisation de l’olivier nous fait les yeux doux depuis déjà cinq mille ans.

dscf2765
dscf3304
dscf3311
dscf2766
dscf2792
dscf2782 dscf2786 dscf2789

dscf2774dscf2795Au bout de la rue, des filets s’enflent sous la Tramontane, au bout d’un petit port qui sent le poisson séché, l’huile d’olive et la peinture. C’est le Port aux Nacelles. Les mouettes peinent à garder leur équilibre sur les longues perches de bois qui sous-tendent les filets. Nous espérons que demain matin, le vent sera tombé et que nous pourrons repartir. Mais si d’aventure ça n’était pas le cas, Sète et ses trésors nous tend les bras, et une journée d’étape est toujours agréable…
Nous lions connaissance avec la famille autrichienne qui occupent « Ayrolle », la sœur jumelle de notre pénichette, amarrée juste derrière nous. Les deux garçons ont trouvé un moyen ingénieux de récupérer l’eau de la petite fontaine sur le quai, à base de ruban adhésif. Nous en profitons pour faire le plein, nous aussi. L’eau file vite, et il est tellement agréable de prendre une bonne douche chaude, le matin… De fait, c’est le seul point sur lequel nous devons faire attention. Grâce aux batteries du bord, si le bateau navigue pendant quatre heures par jour, nous pouvons vivre en autarcie complète : lumière le soir, et musique classique ou Led Zeppelin à volonté sur la chaîne stéréo. Il est 20 heures. Le gigot rissole doucement dans le four, nous prenons l’apéritif dans le carré… C’est l’extase.

Nous nous sommes réveillés tôt. Nous aurions pu profiter de la couette encore un moment. Les recommandations de Christine, ont été très claires : le vent doit être inférieur à 3 beaufort pour naviguer sur l’étang de Thau.
La journée sera donc dédiée au cimetière marin, et à la visite de la ville.

dscf2797

 

dscf2769

 

 

dscf2818 dscf2771
dscf2805
dscf2808
dscf2770

 

La mort n’est certainement pas un sujet réjouissant, mais tant qu’à faire, autant donner envie à ceux qui viennent vous voir dans votre dernière résidence… Je ne suis pas un spécialiste des cimetières (si, si, il y en a) mais sincèrement, une visite à cet endroit béni des dieux, entre ciel, mer et colline, vaut bien le temps que vous mettrez à gravir la pente pour arriver tout en haut. Le soleil chauffe les pierres blanches des monuments, quelques pins offrent une ombre bienfaisante, réparatrice, et odorante, et la mer, en arrière plan, d’un bleu pâle gorgé de reflets, évoque l’éternité paisible du temps qui s’écoule. Paul Valery repose ici, en compagnie d’autres moins célèbres. Brassens, lui, est quelques centaines de mètres plus loin sur la corniche, au cimetière Le Py, celui des pauvres…

dscf2813
dscf2812 dscf2817 dscf2816

En ville, du côté des vivants, les couleurs ont pris le dessus : les bornes anti-stationnement font la fête le long des trottoirs. Les ruelles ombragées descendent vers le port et le Canal de Sète au milieu des volets peints et des balcons fleuris. Sur le chemin, la plus ancienne église de Sète : la Décanale Saint-Louis, bâtie en 1702 en l’honneur du saint patron de la ville.
En quittant l’abri du mont Saint-Clair et en retrouvant les deux ponts de l’entrée du port, il faut se rendre à l’évidence : le vent n’a pas faibli. Nous commençons à craindre d’être obligé de rester à quai encore quelques temps, souci partagé par le skipper d’ « Ayrolle ». Nous échangeons nos impressions entre deux rafales lorsque survient un petit bonhomme vêtu d’un pull bleu et d’un bonnet assorti, muni d’un sac en plastique bourré de vieux croûtons.
« Partez de très bonne heure, avant que le vent se lève. Nous, les professionnels, c’est ce qu’on fait quand il y a du vent ». Sur ces mots, le vieux pêcheur acheva de jeter ses quignons de pain aux mouettes et rentra chez lui.
Je reste persuadé que cet homme a émis sa sentence pour tester l’esprit aventureux des touristes que nous sommes. J’ai donc passé un coup de fil à la capitainerie (04 67 46 34 93 – 04 67 74 38 05), histoire de savoir… Une voix charmante à l’accent ensoleillé me suggère de partir au tout petit jour. « Le vent se lève vers 9 heures, d’habitude… ». Je reviens vers mon nouveau camarade autrichien d’infortune, et nous décidons de partir au plus tôt le lendemain, vers 6 h 45. Il faut en gros deux heures pour traverser l’étang, cela devrait suffire.
En fin d'après-midi, en jetant un coup d'œil machinal par l'une des baies du carré, j'aperçois un drôle d'engin. Une sorte de catamaran qui aurait été construit par des égyptiens anciens. Je sors pour observer l'embarcation, et, stupeur… les deux ponts sont levés ! C'est un spectacle rare : il ne peut se produire que deux fois par jour, sur demande à la capitainerie, et interrompt le trafic ferroviaire de l’un des ponts et la circulation automobile sur l’autre.

dscf2819 dscf2840 dscf2843

   
Texte : J-F Macaigne
Photos : J. Cloarec & J-F Macaigne