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L’hiver
1783-1784 fut l’un des plus rudes qu’ait eu à connaître
Paris et sa région. Et pourtant, la froidure de l’air fut
d’une aide sans pareille pour le décollage de la première
montgolfière habitée, le 21 novembre, du château
de la Muette. Pilâtre de Rozier et le marquis d’Arlandes étaient
aux commandes, sous les yeux émerveillés de Louis XVI et
de la cour qui les regardaient, mille mètres plus bas, aux Tuileries… La
dureté de cet hiver-là eut une autre conséquence.
Ce n’était pas une reprise du vieux projet datant d’Henri IV,
mais tout simplement une nécessité : il fallait plus
de bois de chauffage pour les parisiens, dont la ville s’étendait.
On étudia donc plus avant la possibilité de faire flotter
le bois du Morvan jusqu’à la capitale. En 86, un rapport
de Bossuet et Condorcet, Commissaires de l’Académie des
Sciences déclenchera le début des travaux. Ceux-ci
s’interrompront en 1791 et ne reprendront qu’en 1807 ! Ils
ne seront véritablement achevés qu’en 1843.
A partir de là, le
canal du Nivernais voit passer la pierre de Chevroches, les graviers
de Corbigny, la houille de La Machine et le blé du Nivernais,
mais surtout, comme Clamecy en garde le souvenir, le courant porte de
longs trains de radeaux. Ce sont les trains de bois. Ils sont maintenant
passés dans notre imaginaire, mais les paysages qui les ont vu
circuler sont, eux, bien présents, et riches de l’histoire
et des traditions de Bourgogne.
Le voyage débute dans un petit écrin
fleuri aux vieilles pierres qui témoignent d’un passé historique
puissant. C’est Corbigny. A l’entrée du village, une
ancienne ferme fortifiée à la porte impressionnante précède
les bâtiments de la formidable abbaye Saint Léonard, en
cours de rénovation. L’Anguisson, petit affluent de l’Yonne,
baigne encore les pieds de cette vieille tour, l’une des quatorze
qui défendaient la ville au XVIIème siècle. Et si,
comme nous, il vous prend l’envie de pousser la porte de l’église
Saint-Seine (1537), admirez les vingt-deux stalles du XIIème qui
bordent le chœur, le lutrin en bois sculpté, et le bénitier
en fonte de 1584. Puis repoussez doucement la porte, et allez donc goûter
les œufs meurettes du Bistrot Bourguignon, tout à côté.
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Après le déjeuner,
nous roulons jusqu’au canal et prenons possession de notre Pénichette® Locaboat
sans permis,
une 1400 Flying Bridge, immense (14m), toute propre et encore bien
rangée.
"Quand est-ce qu’on part ?" semble être la question à la
mode.
Minute.
Il
faut d’abord remplir les papiers, se faire expliquer le fonctionnement
du bateau (même sans permis, quelques révisions s’imposent),
installer les bagages et surtout les provisions, étudier une dernière
fois l’itinéraire, et… attendre le lendemain une
grosse centaine de mètres plus loin, histoire de prétendre
que l’on a largué les amarres, et surtout de se retrouver
entre soi. Il est passé 18 heures, les écluses vont fermer.
A nous la soirée en pleine nature, commencée par un verre
de rosé au crépuscule. Le pont supérieur est plus
qu’accueillant, et même si l’on descendra dans le carré pour
le dîner, le coucher de soleil sur le canal est pur bonheur.
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