De Briare à Dompierre/Besbre JF Macaigne


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        Briare   Châtillon/Loire   Sancerre   Le Canal    Nevers    Decize    Abbaye de Sept-Fons

Je suis réveillé très tôt par un bruit de moteur. Il est l’heure de se lever, mais tout est si calme, si ouaté, que l’idée même de sortir du lit est un supplice. La meilleure façon d’arrêter ça est d’enfiler quelque chose et de sortir s’aérer. Et là, de la brume, surgit une Pénichette. Tranquille, sereine, solitaire. Elle passe à côté de nous, et disparaît un peu plus loin. Une façon comme une autre de me faire sentir l’urgence d’un bon café chaud… avec les croissants - nous avons été prévoyants hier avant de quitter Nevers. Le soleil se lève à peine, et éclaire les feuilles rousses et jaunes en contre-jour.
Nous suivons un long bief de 10 km jusqu’à l’écluse de Jaugenay. Depuis le début du parcours, nous avons eu relativement peu d’écluses : 15, plus l’écluse double du pont canal du Guétin, et les 2 écluses de l’embranchement de Nevers. En 100 km, cela n’est pas beaucoup, comparativement à d’autres parcours, plus fournis.Cela donne une croisière agréable et sans à-coup, où il est relativement facile de calculer son temps de navigation (compter environ 20 minutes par écluse, en règle générale, mais il peut y avoir de l’attente…).Elle se déroule très majoritairement en milieu « naturel », et les grosses villes ne sont pas légion. A conseiller donc, à ceux qui sont plus « campagne », doublés de gastronomes (la région regorge de plats, de fromages et de vins succulents, mais qui ne dédaignent pas un peu de vieilles pierres et de restos sympas de temps en temps.
A l’écluse de Fleury, chacun son truc : Michèle et Lou-Ann font les folles dans une cabine, Franck s’essaie aux joies délicates de la macro-photographie sur une crémaillère rouillée, et moi je tombe en pamoison devant les ombres que dessine sur un pré ce groupe d’arbres en contrebas.
Nous repartons, lestés d’un gros paquet de noix fraîches ramassées sous un noyer de la berge. Avec le fromage de chèvre, c’est succulent. Un héron décolle juste devant nous, et dans le scintillement de l’eau, c’est magique. Quelque temps plus tard, sous sommes sous l’œil perçant d’une buse, qui tournoie dans un ciel azuréen. Enfin, pas loin de l’écluse de l’Abron, surprise : un nid de cigogne ! Renseignements pris, une famille a nidifié ici. L’une des cigognes vient de Barcelone, l’autre est  de la région, et les deux élèvent leurs petits pas si petits sur un mât à la manière alsacienne. On ne se lasse jamais des surprises que réservent les canaux.
L’Abron est une petite rivière par dessus laquelle passe le canal, tout comme l’Acolin, quelques dizaines de mètres plus loin. Le pont-canal est à la mode, dirait-on. Ceux-ci sont quand même de taille infiniment plus modeste que ceux de Briare ou du Guétin.
Decize existait déjà du temps où César écrivait La Guerre des Gaules, que tous les latinistes connaissent bien. C’est dire. Il ne reste évidemment rien de cette époque, sinon le souvenir, mais en se promenant dans les rues, on découvre d’anciens souvenirs : les restes du château des comtes de Nevers, aujourd’hui surplombés d’une statue de la Vierge ; la rue Guy Coquille, du nom de cet homme sage du XVIe siècle, juriste et ami de Francis Bacon et de Michel de L’Hospital ; la porte du Marquis d’Ancre, la seule des cinq portes de la ville à exister encore ; la tour de l’Horloge, dont la plus grosse des trois cloches pèse 1,3 tonne ; l’ancien couvent des Minimes, prieuré bénédictin du XIe siècle ; l’église St Aré, dont les parties les plus anciennes datent du VIIe siècle, et qui porte le nom de cet évêque de Nevers dont le corps, remis à une barque sur la Loire, remonta le cours du fleuve jusqu’à Decize où il s’arrêta. Il y fut inhumé.