Exoti.com (Accueil)
sp sp sp sp sp sp sp
Reportages Sommaire Reservez News Coups_de_cœur contact sp
La Hollande par le Sud
JF Macaigne


Toutes les vignettes de la page donnent accès au diaporama de ce reportage

Cela faisait un moment que j’entendais des ordres en néerlandais qui paraissaient flotter sur le canal. J’ai donc ouvert la porte de la cabine arrière pour jeter un œil dehors pour me rendre compte. Le dimanche, les hollandais pratiquent les sports nautiques. De bonne heure. Un skiff et un quatre avec barreur, composé de cinq dames ayant probablement des petits enfants s’offraient une petite course sur l’eau immaculée.
Nous nous sommes sentis aussitôt un peu coupables, et avons préparé le café. Mon copain Salem est allé acheter le journal, et j’ai trouvé qu’il était très optimiste car il ne parle pas un mot de hollandais. Mais bon, l’espoir fait vivre.
Nous avons ensuite largué l’haussière et fait route vers Utrecht. L’aviron suivait. Nous les avons semés à la sortie de Marssen. Plus exactement, c’est là qu’elles ont fait demi-tour. Nous, nous sommes passés sur l’Amsterdam Rijn Kanaal, et c’est à ce moment qu’il a fallu ranger tout ce qui traînait.
Des sortes de monstres gigantesques, menant un train d’enfer, arrivaient en face. A chaque fois, le bateau démarrait une sorte de rock n’roll dément avec les vagues. On s’habitue à tout, mais après le calme du canal, au départ, ça surprend. On aurait aisément pu placer au moins deux bateaux comme le nôtre dans la cabine arrière de ces barges.

Le paysage est passé du champêtre à l’industriel. Une usine, avec ses longs tuyaux verticaux, aurait pu faire aisément, en des temps anciens, la couverture d’un vinyle des Pink Floyd.
C’est alors qu’a surgit le pont. Un pont blanc immense, aérien, pur, comme une harpe colossale survolant le canal. Je n’étais pas préparé. Le temps que je prenne l’appareil, nous étions déjà dessous. La vision s’est estompée au loin rapidement. Les faubourgs d’Utrecht réservent des surprises ! J’ai appris plus tard que ce Papendorpbrug était une des fiertés architecturales de la région. A juste titre.

Un gros canot ventru en bois verni nous a dépassé dans un sillage d’écume, et nous avons pénétré dans Utrecht. Juste après l’écluse, quelques autres monstres sommeillaient le long de la berge, juste avant un pont bizarre qu’on aurait dit sorti d’un coffre à jouets pour géants.
En avançant encore, nous avons trouvé le nid. Tous les avirons que nous voyions depuis un moment sortaient de là, comme d’une ruche en pleine activité. Plus loin, c’est un minuscule bateau à moteur que nous avons croisé, comme un petit remorqueur rétréci au lavage.

Un dernier pont levant, et nous sommes entrés en ville, au milieu de maisons somptueuses et étranges parfois, sur le calme d’un petit canal ombragé bordé de demeures victoriennes. Après avoir évité le nid d’une poule d’eau (1), protégé par la municipalité (il n’y a qu’en Hollande où l’on peut voir ce genre d’attention), nous nous sommes attachés à un long ponton de bois où des amoureux prenaient le soleil. Tout est fermé, le dimanche, excepté les cafés, et les magasins ne rouvrent que le lundi après-midi. C’est donc un petit air de vacances qui planait autour de nous : quelques joggeurs, des jeunes filles qui passaient en riant, beaucoup de chiens qui promenaient leurs maîtres, parfois avec véhémence. Un tour de clef, et direction la vieille ville. En fait, nous y étions déjà !

Utrecht n’est que beauté, surprises (il faut savoir lever le nez), petites rues délicieuses, façades à pignon ciselés, statues, cafés sympas, porches magnifiques. Une sorte d’Amélie Poulain du tourisme. Partout, une petite histoire, une photo surprenante, un coin de rêve… Dans Oudegracht, le canal de la vieille cité, une foule joyeuse, parfois bruyante, mais toujours souriante, se balade en canot (certains sont magnifiques), pédalos, kayaks, et même cabin-cruisers de luxe. Sur les berges de briques brunes, des cafés ont récupéré l’espace des petits entrepôts nichés à l’intérieur des quais. On y dîne ou prend un verre en écoutant le carillon du beffroi du XIVème siècle (2), le plus haut de Hollande. D’en haut, perché à 112m, on peut apercevoir Amsterdam par beau temps. En dessous, un accordéon pleure des chansons de Piaf dans l’indifférence générale. Et à côté, quelques hordes de japonais visitent la cathédrale construite en 1254 pour remplacer celle détruite dans un incendie l’année précédente. Dans les cafés branchés, on s’alanguit, on discute, on s’étale, on partage le paysage et les grandes discussions. Une montgolfière survole la ville sans bruit, doucement, comme en rêve. En bas, nous sommes revenus au bateau sans nous presser, en profitant de l’air doux du crépuscule.

(1) Comme quoi, même sur l’eau, il peut y avoir des nids de poule…

(2) Domtoren, qui à l’origine, faisait partie intégrante de la cathédrale.

     
Texte & photos : ©JF & P Macaigne
   
 
[Accueil][Sommaire][Reportages][Caraïbes][Europe][Méditérannée][Océan Indien][Plan du site]